Et pourtant il roule!

Et pourtant il roule …

Avec le centenaire du Tour de France le vélo fait la Une de la presse « grand public » les exploits des Terron, Garin, Petit-Breton, les duels homériques Coppi-Bartali, Kobler-Kubler, Gaul-Bahamontès nous sont racontés par le menu. Il intéresse aussi des historiens avec la belle exposition du Conservatoire National des Arts et Métiers. Il occupe enfin une très sérieuse revue scientifique – Pour la Science – qui revient sur la question essentielle : pourquoi roule-t-il ?

Question saugrenue, pensez-vous ? – que nenni ! l’engin n’a que deux points de contact avec le sol et devrait logiquement ne pas résister aux dures lois de la pesanteur dès que son utilisateur ôte ses deux pieds de la surface terrestre.

C’est certainement la raison pour laquelle il fallut attendre 1817 pour que soit découvert par hasard cet équilibre paradoxal alors même que les composants essentiels de la bicyclette étaient connus depuis belle lurette.

Un principe physique bien connu et une particularité technique du vélo président à cet équilibre : la force centrifuge et la chasse.

Chacun connaît les effets de la première qui entraîne au fossé l’automobiliste mal cramponné à son volant, qui plaque le café contre les parois du moulin électrique … L’intensité de cette force est égale au produit de la masse du mobile par le carré de sa vitesse que divise le rayon du virage. En clair, à poids égal, plus on va vite et plus on braque « fort », plus cette force est intense.

cadre_rouesLa chasse est la distance entre le point de contact de la roue avant avec le sol et le point d’intersection de l’axe de rotation du guidon avec ce même sol (ci-contre)

Marchez à côté de votre vélo que vous tenez par la selle. Inclinez-le d’un côté, vous constatez que le guidon tourne du même côté, c’est grâce à cette chasse.

Le reste est affaire … d’imagination ! vous êtes assis sur votre vélo et vous vous lancez. L’équipage, instable par nature puisque posé au sol sur deux points de contact, va pencher, grâce à la chasse, tourner du bon côté (du côté où ça penche !) et tomberait si la vitesse créée par votre premier coup de pédale rageur et ce virage ne provoquaient une force centrifuge qui vous renvoie de l’autre côté où le même phénomène se reproduit. Vous comprenez maintenant pourquoi votre trajectoire de démarrage ressemble à celle d’un piéton éméché. Et si vous n’êtes pas convaincu, mouillez vos pneus, démarrez sur sol sec et regardez la trace, elle ressemble à une sinusoïde amortie.

Nul doute qu’après avoir relu et compris cette démonstration, vous allez chevaucher encore plus fièrement votre prestigieuse machine !